La fausse quête du graal du bonheur au travail

par | Juin 13, 2019

Burn out*, bore out* et même brown out*, les entreprises n’ont jamais autant fait pour rendre leurs salariés heureux au travail, (espaces de détente, happiness Manager, formations, team building, baby-foots, flipper…). Nourris par une intention positive de les préserver, les chefs d’entreprise ne se sont jamais autant préoccupés de la santé et du bien-être de leurs collaborateurs ; pourtant les arrêts de travail continuent de fleurir.

On est en droit de se poser la question alors mais que faut-il faire pour rendre les salariés heureux ?

Comme l’explique Julia de Funès*, d’un système de management paternaliste, nous avons basculé vers un système maternaliste qui infantilise les salariés via des trainings, des escape game, kappla, legos…, également au travers de l’installation de bars à smoothies, de distribution de graines…en mode start-up.

Et s’il fallait plutôt résoudre l’équation différemment.

Faut-il nécessairement rendre les salariés heureux pour qu’ils soient performants ?

La réponse est toute simple, les salariés heureux sont ceux qui se réalisent dans le travail. La réponse semble tellement évidente et tout l’enjeu réside donc dans ces questions sous-jacentes

  • Quel est le sens donné par l’entreprise ?
  • Quelle autonomie est donnée aux collaborateurs ?
  • Quelles procédures puis je simplifier ?

Distinguez bonheur et bien-être

Est-ce qu’on dit déjà adieu aux nouveaux « chief happiness manager » ou « manager du bonheur » en français ? Non pas encore. Si leur vocation est de permettre d’engager des relations positives entre les individus c’est très bien, même si c’est au travers de jeux, de gommettes, de post-it collés sur les murs, on garde. Toutes les initiatives pour concourir au bien-être des salariés peuvent et doivent être encouragées pour attirer et fidéliser les collaborateurs.

Pour autant, gardez bien en tête que l’entreprise n’a absolument ni la vocation ni la capacité de rendre les gens heureux au travail.

C’est toute la distinction entre bien-être, donnée sur laquelle vous avez les moyens d’agir et le bonheur dont vous ne pourrez que constater l’ampleur. Vous croyez que ça va lui mettre du baume au cœur le type dont sa femme vient de le quitter, de se retrouver dans une course en sac ou de gouter le dernier smoothie détox ?

Vos collaborateurs ont besoin d’une oreille attentive. Préoccupez-vous avant toute chose de leurs besoins réels dans l’entreprise et de ce que l’entreprise provoque elle-même comme crispations dans leurs tâches quotidiennes.

Les 6 clés du bien être en entreprise :

1/ Quelle est la raison d’être de votre l’entreprise ?

Tous les collaborateurs ont besoin d’avoir un sens pour avancer, quel que soit leur âge (voir article générations). Définissez clairement votre stratégie, communiquez la aussi souvent que possible.

La loi Pacte actuellement votée à l’assemblée permet, sur la base du volontariat d’inscrire la « raison d’être » de l’entreprise dans les statuts au même titre que les ressources, le capital et les moyens. Les entreprises ne sont plus uniquement des « machines à faire du fric ». Donnez une autre dimension à votre société et la relier à ce qui la relie au monde, à la société.

Des initiatives ont été prises par des grands groupes (veolia, Schneider…) et plus près de chez nous, le cluster Novabuild (incubateur de l’éco-construction) incite ses 400 adhérents à réfléchir à leur raison d’être.

Je vous invite à faire cet exercice avec vos collaborateurs pour partager avec eux votre vision du monde et de vos valeurs.

2/ La marque employeur : vos 3 leviers pour garder vos salariés

Aucun secteur n’est épargné par les difficultés de recrutement et de turn-over. Les entreprises doivent sortir du lot et séduire en affichant des valeurs partagées.

Loin des préoccupations purement marketing, votre marque employeur doit faire ressortir les stratégies relationnelles.

Pour cela vous avez 3 moyens d’action classés dans l’ordre croissant des bénéfices profonds pour vos salariés;

  • Avantages économiques : les salaires. C’est le piège absolu, vous attirerez des candidats en masse, mais si vous n’avez pas comblé les autres leviers, vous ne fidéliserez pas vos salariés.
  • les avantages fonctionnels : bureau confortable, horaires de travail flexibles. C’est le niveau sur lequel les entreprises mettent actuellement leur énergie et leurs moyens, au détriment du dernier :
  • Avantage psychologiques : sens au travail, utilité, ambiance de travail. Mettez le paquet sur le sens au travail, les salariés y adhèreront, ou pas, en tous cas feront un choix à long terme sur l’appartenance à la mission profonde. De la même chacun d’eux pourra s’y identifier, se retrouver sur les valeurs et s’aligner sur le savoir être tant prisé par les services RH. Référez-vous aux travaux de R.Dilts sur les niveaux logiques. (voir photo.

3/ Valorisez vos collaborateurs

Quand avez-vous remercié sincèrement vos collaborateurs pour la dernière fois? Par une attention sincère, directe, même juste un mot ?

Détournez-les des objectifs purement matériels (demande d’augmentation…). S’ils ont la sensation de faire partie d’un projet plus grand que leur chèque de fin de mois, vous aurez tout gagné et c’est bien l’aspiration des jeunes générations.

J’ai été personnellement bluffé par un dirigeant capable de me citer les prénoms, nom, ville, sport, âges des enfants de chacun de ses 80 salariés. Vous voulez savoir son secret ? Il passe 1h chaque matin à dire bonjour à tout le monde. Une perte de temps ? Au contraire, grâce à ça, il sait identifier instantanément chaque mal être, les problèmes sont identifiés à la source, bref ses collaborateurs lui ont accordé la confiance suprême. Alors 1H, c’est quoi au juste ? surtout quand on prétend mettre ses salariés au cœur de la raison d’être de son entreprise ?

4/ Quelle autonomie est donnée aux collaborateurs ?

Vos collaborateurs ont du talent, ont des idées. Mais alors pourquoi ne les partagent t’ils pas? Mettez leur à disposition des temps de créativité, c’est-à-dire des moments pendants lesquels ils peuvent enlever les œillères, changer de regard sur leurs taches, partager leurs préoccupations avec d’autres services. Les réponses sont dans le questionnement, le simple fait de verbaliser ses difficultés fait émerger des solutions.

Faites les sortir de votre entreprise, rencontrer des clients, des partenaires. Plus vous aurez de collaborateurs au contact des clients, plus ils mettront de l’engagement et du soin dans leur métier. Gardez en tête que votre client fait vivre l’ensemble de l’entreprise. Vous pouvez même l’incarner par une peluche, par une chaise d’une autre couleur en salle de réunion. Ils auront mis un être humain à la place d’un nom de destinataire et c’est ce qui change tout.

Les fêtes de l’échec.

Aux Etats-unis, des entreprises, dont Intuit, ont en 2018 commencé à organisé des « failures parties » visant à récompenser et dédramatiser les équipes devant faire face à un échec. Le but : favoriser l’agilité, la prise de risque. La culture de l’échec est une notion qui s’apprend et qui permet aux collaborateurs de continuer à se sentir à l’aise et perpétuer la motivation à long terme.

5/ Quelles procédures puis je simplifier ?

Faites en sorte que vos collaborateurs investissent leur temps pour ce dont ils ont été recrutés. Tableaux excel, feuilles de présence, bases de données multiples…Tout ce temps gaspillé pourrait leur permettre justement de prendre du temps pour sortir la tête du guidon et réfléchir sereinement.

6/ Identifiez les sources de stress,

Les problèmes de communication entre les collaborateurs, identifiez toutes les procédures inutiles et agissez directement.

Consultez le site de l’INRS qui a lancé un programme nommé Satin, un questionnaire à répondre en ligne.

http://www.inrs.fr/risques/bien-etre-travail/questionnaire-satin.html

Les Chiffres des risques psycho-sociaux

7 salariés sur 10 déclarent avoir un travail nerveusement fatigant

24% des salariés Français sont en situation d’hyperstress, considérée comme dangereuse pour leur santé. Cet état concerne davantage les femmes (28%) que les hommes (20%). C’est dans le secteur de la santé (42% des actifs), du spectacle (31%) et des services (29%) que les salariés se disent le plus hyperstressés. (Cabinet Stimulus, 2017)

18% des salariés affirment avoir été victimes d’un burn-out (syndrome d’épuisement professionnel). 22% en ont été témoins dans leur entreprise et

  • En France, 45 % des actifs occupés déclarent devoir (toujours, souvent) se dépêcher
  • 25 % déclarent devoir cacher leurs émotions, faire semblant d’être de bonne humeur (toujours, souvent)
  • 25 % disent devoir faire appel à d’autres en cas d’incident
  • 30 % signalent avoir subi au moins un comportement hostile dans le cadre de leur travail au cours des 12 derniers mois
  • 10 % disent devoir faire des choses dans leur travail qu’ils désapprouvent
  • 25 % craignent de perdre leur emploi

Définitions : (wikipedia)

Burn out* : littéralement « brûler à l’extérieur » qui signifie saturation, épuisement.

Bore out* : syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui

Brown out* : Cette forme de dépression au travail se traduit par un manque de motivation, de sens dans ce qu’on fait.

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